Les obsèques de l’ancien directeur du SIS 2B décédé lundi des suites d’une longue maladie ont été célébrées ce mercredi 23 octobre 2024 en l’église de Cardo, sur les hauteurs de Bastia. Une importante délégation des sapeurs-pompiers du SIS 2B était présente aux côtés de la famille et les amis du défunt pour lui rendre un dernier hommage.
C’est en l’église de Cardo que les obsèques de « Jacky » Casanova ont été célébrées ce mercredi 23 octobre 2024. Une cérémonie très sobre, célébrée par l’aumônier du SIS de Haute-Corse, l’abbé Georges Nicoli, avec la participation de la chorale paroissiale de Cardo. Durant l’office, des lettres posthumes que le défunt âgé de 72 ans avait rédigé de son vivant ont été lues par son ami et ancien collègue le capitaine Serge Savignoni, puis par ses cousins Christiane et Robert Casanova.
Un ami, une référence, un chef
Âgé de 72 ans, le lieutenant-colonel Jean-Jacques Casanova s’est donc éteint lundi 21 octobre après un long combat acharné contre ce terrible mal, qui emporte même les plus forts. Les pompiers de Corse sont tristes comme peuvent l’être tant d’autres personnes, en Corse et au-delà de notre île. Nous perdons un ami, un collègue, une référence, un chef.
C’était une forte personnalité au caractère trempé, un passionné qui à travers son fonctionnement disruptif avait déclaré la guerre au feu, à la médiocrité, et qui était prêt à tout pour sortir la Corse de cette impasse des feux de forêt, ce fléau qui tuait et compromettait son avenir.
Véritable commandant en chef il a inspiré de nombreuses générations de sapeurs-pompiers. Son héritage est immense.
Aujourd’hui nous pensons très fort à son épouse, ses enfants, ses petits-enfants et au-delà à toute sa famille et ses amis qui pleurent l’homme sensible, exemplaire, loyal et fidèle qu’il était.
Qui était Jean-Jacques Casanova ?
Jacky, l’enfant de Cardo, passionné de sport, est l’un des principaux artisans de la doctrine française de lutte contre les feux de forêt. La doctrine « Vulcain » élaborée par un groupe de passionnés autour de lui et du colonel Antoine Battesti est reconnue dans le monde entier. Elle a permis depuis son adoption dans les années 1990 de diminuer très sensiblement l’impact des incendies de forêt sur les territoires du Sud de la France.
Doté d’une solide expérience opérationnelle acquise notamment à l’occasion de sa participation aux campagnes feux de forêt depuis une trentaine d’années, son action décisive en tant que Commandant des opérations de secours lors de la catastrophe de Furiani en 1992 a été reconnue.
Jean-Jacques Casanova a notamment occupé les fonctions de chargé de formation feux de forêt de l’Ecole d’Application de Sécurité Civile. Dans ce cadre il a grandement contribué à la conception du système de mise en situation utilisé pour ces formations. Il a ensuite été Secrétaire Général de l’Entente Interdépartementale pour la Protection de la Forêt Méditerranéenne, puis Directeur des Services d’Incendie et de Secours de Haute Corse.
Il a également dirigé l’Institut Euro-méditerranéen des feux de forêt adossé à l’université de Corse.
Il nous quitte après une terrible épreuve ou son courage et sa dignité ont été exceptionnels. Il s’en va au-delà, pour retrouver une partie des siens, de ceux qui l’ont précédé.
Il y retrouvera aussi son Père spirituel, celui qui l’a marqué au fer rouge, imprégné, incité l’homme, le pompier, le chef à savoir le Colonel Antoine Battesti.
Ensemble ils referont le monde, l’Europe, la Corse. Ils prépareront sûrement la prochaine Doctrine du feu de forêt et rêveront de rendre la Corse resplendissante, innovante, ancrée dans sa culture mais aussi dans la modernité et enviée de tous par sa capacité à agir, à surprendre.
Adossé au tableau papier, Jacky à l’écriture ciselée réagira aux impulsions du « vieux Lancelot ». Sans mal ils coucheront avec vision, anticipation et efficacité les enjeux et les parades aux événements climatiques les plus extrêmes des prochaines décennies.
Et puis ils recommenceront, sans fin, avec détermination et pédagogie à redéfinir la doctrine et le guide de stratégie, dans une déclinaison de Méthode de raisonnement tactique maitrisée à la perfection, jusqu’à ce que chacun puisse se rendre compte que le génie , que l’intelligence collective est la marque de fabrique de ces hommes.
Jacky croisera aussi le fidèle Jean, son ami pharmacien qui l’a accompagné avec Daniel, mais aussi tant d’autres dans la gestion opérationnelle de la catastrophe de Furiani. Cette terrible catastrophe qui a été révélateur de sa force opérationnelle, de son intelligence, de son intuition. Cette catastrophe qui a laissé surtout une blessure émotionnelle qui n’a jamais guéri et l’a poussé, sûrement, à l’exil.
Depuis lundi soir nous pleurons Jacky Casanova. Il nous manque tant. La tristesse est légitime, bien qu’il n’aurait sûrement pas voulu que ce moment ne se résume qu’à ça. Alors reprenons nous et mesurons surtout l’honneur, la chance et le plaisir de l’avoir connu et croisé, même si la route empruntée n’a jamais été un long fleuve tranquille, tantôt de feu ou de glace, riche en œuvres et en émotions. Merci à Jacky Casanova d’avoir été pour nous une force attractive et motrice, un guide, un maitre à penser.
Merci d’avoir suscité autant de passions et d’envies auprès de jeunes corses admiratifs de ses réalisations, de sa liberté de penser et d’agir.
Merci de nous avoir bousculés afin de maitriser notre avenir, de nous assumer, de prendre nos responsabilités.
Quelle chance pour nous d’avoir pu vous connaitre, vous côtoyer, d’avoir aidé à nous construire. Quel bonheur de vous avoir servi.
Jean D’Ormesson a écrit :
« Il y a quelque chose de plus fort que la mort, c’est la présence des absents, dans la mémoire des vivants ».
Votre souvenir ne s’estompera donc jamais, comme ce moment de convivialité, il y a déjà 6 mois, passé ensemble au SIS 2B à Furiani pour vous rendre hommage de votre vivant. Quel moment de grande émotion, pour vous entendre et apprécier votre grande sagesse au plus dur de cette terrible épreuve contre laquelle vous avez lutté jusqu’au bout !
Vous méritiez tant ce bel hommage, ce moment de symbiose et de reconnaissance, entouré des vôtres, votre famille et vos amis.
« Sachez voir le meilleur dans chacun de nous », disiez-vous alors. Le temps du grand pardon était venu, celui de l’apaisement, et de la triste réalité de cette vie. Vous nous laissez un bel héritage, montrons-nous en dignes.
Ripusate in santa pace caru Jacky, voi chè vò avite fattu fronte à sta malatiaccia cum’è un leone chè vò erate per u sempre.
Pour consulter l’article que nous lui avions récemment consacré, avec l’hommage des président et directeur du SIS de Haute-Corse lu à cette occasion, cliquer ici.
